Un président est le premier citoyen d’un pays, il le représente aux yeux du monde entier. Quel intérêt à l’être si on ne fait pas honneur à la fonction ? Si on n’en est pas digne… Par dignité on entend là ce sentiment de noblesse pouvant caractérisé sa grandeur d’âme, mais non un semblant de volonté de leadership nourri par l’héritage d’un capital symbolique conféré par un quelconque statut de dauphin. Avoir la bénédiction de son prédécesseur ne garanti pas le dépassement de soi, encore moins l’éveil de conscience pour jauger ses véritables capacités. « Suis-je digne pour diriger un pays ? Suis-je capable de prendre des décisions pour l’avenir de tout un peuple ? ». Des questions qui reviennent quotidiennement quand on est à la tête de la Magistrature Suprême de l’Etat.
On peut se demander quel est l’intérêt d’être un chef d’état si on n’arrive pas à charrier les revendications du peule et travailler sans relâche pour les satisfaire. Quel est l’intérêt d’être un dirigeant si on se délaisse des véritables besoins de sa population ? Pourquoi s’accrocher au pouvoir quand on est décrié par le peuple même qu’on est sensé travailler à son bien-être ? Ne serait-il pas plus noble dans pareille circonstance de jeter l’éponge ? Ne serait-il pas plus grand ? La grandeur : une notion qui nous fait grandement défaut ces derniers temps.
Un peuple qui croupit dans la misère, qui se noie dans un fleuve de promesses non tenues, qui s’est fait captif de l’incompétence systématisé, relève d’une réalité carrément inconcevable en plein 21ème siècle. Ce pays a plus que jamais besoin de l’homme qu’il faut à la place qu’il faut. Non pas ces rabat-joie à la mentalité étriquée, ces amateurs professionnels qui tâtonnent avec l’avenir de nos enfants en nous crachant au visage des promesses irréalisables. Que c’est triste d’entendre des candidats au législatif lancer des promesses de route, de travail, de nourriture… Qu’est-ce qu’ils font des véritables attributions du pouvoir législatif ?
Le financement privé des candidats lors des campagnes électorales ; une autre source de corruption qui n’est pas assez abordée dans le débat public. Aucune réglementation sur le montant de ces argents, aucun contrôle sur ces fonds avancés par les tenants du secteur économique. Certains candidats dépensent des montants astronomiques pour être dans la bonne grâce des électeurs, quand ce n’est pas pour contrôler tout bonnement la machine électorale. On distribue généreusement des billets aux gens pour acheter leur vote, des kits de toutes sortes, t-shirts, billboards, subventions pour les activités de débauches… Ici, on nous prend par le ventre. D’aucuns peuvent se demander d’où viennent ces argents ? Et comment surtout ces candidats vont pouvoir les rembourser ? On a tous notre petite idée, pas la peine de vous faire un dessein…
Le peuple haïtien a besoin d’un bon réveil citoyen pour espérer un lendemain meilleur. Il devra arrêter de vendre son vote au plus offrant, ou de se laisser influencer par les coups de pubs médiatiques. Avant tout, il serait déjà bien de se demander si la personne en question est digne de nous représenter ? Est-ce qu’elle a un programme viable ? Détient-elle la capacité nécessaire pour prendre les bonnes décisions dans l’intérêt du pays et pour notre futur à tous ?
La politique ne doit pas être un moyen pour s’enrichir. C’est un travail, une responsabilité que le peule vous confie. Le népotisme est à bannir dans la gestion de la cité, car les mauvaises décisions engendrent des répercutions négatives avec des conséquences néfastes pouvant touchées plusieurs générations. Un dirigeant doit avoir pleine conscience de la quintessence de son rôle et ceci n’est pas pas donné a tout le monde. C’est un long processus de triture politique, de compétence et d’honnêteté qui ne s’acquiert pas du jour au lendemain.
Malheureusement, jusqu’à aujourd’hui la mauvaise gestion des affaires de l’Etat pèse très lourd sur le dos du peuple. Elle nous laisse avec des dettes faramineuses accumulées d’année en année et dont nos filles et fils devront s’acquitter à l’avenir.
Verra-t-on le jour où un gouvernement méritocratique arrivera finalement à marquer la rupture et faire la différence ? Des femmes et des hommes qualifiés, efficaces dans la pratique pour mettre un terme à cette interminable descente aux enfers. Il faut laisser la politique à ceux-là qui ont une certaine préparation pour l’embrasser. Jouir d’une quelconque popularité parce qu’on est artiste ou pour toutes autres raisons similaires, ne signifie pas forcément qu’on a la réponse aux problèmes fondamentaux et qu’on saura faire mieux. Le peuple a besoin de regagner sa dignité, de retrouver son envie de vivre. Il attend que ses représentants fassent preuve de bon sens, de caractère, tout en mettant leur compétence au service du plus grand nombre. Des dirigeants responsables qui puissent leur apporter un peu d’espoir en leur garantissant un minimum de bien-être.
Les citoyens veulent aussi se sentir en sécurité quand ils circulent dans la rue. Ils veulent la paix. Ils ont besoin de s’assurer de la bonne qualité de l’éducation de leurs enfants, mais non d’une formation au rabais dans un climat d’incertitude. Une situation stable qui puisse susciter chez les étrangers l’envie de découvrir notre richesse culturelle, le besoin pour les haïtiens de partout de revenir à la mère patrie. Un regain de conscience qui remettra notre jeunesse sur le chemin de la dignité et de l’excellence pour une relève assurée.
Tout le contraire de ce qu’on vit aujourd’hui. Car on est à un carrefour où la méfiance se fait mode. La confiance est en grève. Le sauve-qui-peut et l’individualisme font loi. Nos institutions sont faibles, les citoyens sont traités dans l’irrespect total. Le peuple est dirigé par des dirigeants dirigés.
Nous vivons une situation tellement insoutenable, qu’elle tend à nous pousser vers la résignation. On est en train de perdre notre âme collective, notre essence en tant que peuple. Et pourtant, on sent malgré tout que le peuple se débat de toutes ses forces. Il veut s’en sortir. Il veut bien croire en des lendemains meilleurs. Nous devrions puiser au plus profond de notre être pour effectuer ce réveil collectif. Nous devrions, tous autant que nous sommes, nous poser cette question fondamentale : « Suis-je digne ? ».
Marie Cherley Stéphanie SANTANA
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